Mars met en lumière les droits des femmes, mais aussi une réalité : leur absence du pouvoir n’est pas un hasard, mais un effacement. Reines, régentes, savantes, elles ont été écartées, hier par la loi salique, aujourd’hui par des biais persistants. Repenser le leadership, c’est refuser cet effacement et ouvrir la voie à plus d’égalité.
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"La mort de l'empathie humaine est l'un des premiers signes et le plus révélateur d'une culture sur le point de sombrer dans la barbarie"
Hannah Arendt
Être une femme, c’est souvent faire des constats douloureux sur le monde dans lequel on vit. Mon mois de mars, dont le 8 est dédié aux droits des femmes, a été riche de ce côté là.
Je ne sais pas vous, mais j’ai longtemps cru que s’il y avait encore relativement peu de femmes aux instances de pouvoir ou de modèles, c’est parce que nous venions à peine d’accéder à l’égalité des droits.
Et puis j’ai appris que les femmes n’étaient pas seulement effacées de l’Histoire, derrière ces fameux grands hommes dont elles seraient l’ombre docile. J’ai découvert qu’elles avaient fait l’Histoire en tant que reines, régentes, poétesses, écrivaines, médecines et même évêques !
Leur histoire n’avait pas simplement été oubliée parce que anodine (forcément, il est plus difficile de marquer son époque lorsque l’on a même pas le droit de porter plainte). Elle avait été tellement importante qu’on a décidé, sciemment, de l’effacer.
Cet effacement commence par la langue. D’ailleurs, fun fact : le correcteur automatique de mon logiciel traitement de texte m’a gentiment conseillé de corriger le terme “médecines” écrit plus haut pour le remplacer par “médecin”. Quand on sait que Google a supprimé le 8 mars de son calendrier… ce n’est finalement pas surprenant. Mais ce que les nombreux opposants à l’écriture inclusive oublient vite, c’est que 𝗹𝗮 𝗳𝗮𝗺𝗲𝘂𝘀𝗲 𝗿𝗲̀𝗴𝗹𝗲 𝗱𝘂 "𝗺𝗮𝘀𝗰𝘂𝗹𝗶𝗻 𝗾𝘂𝗶 𝗹’𝗲𝗺𝗽𝗼𝗿𝘁𝗲 𝘀𝘂𝗿 𝗹𝗲 𝗳𝗲́𝗺𝗶𝗻𝗶𝗻" est en réalité un choix arbitraire figé par Messieurs Larousse et Bescherelle en 1830.
Autre constat douloureux, mais éclairant : les femmes étaient tout autant légitime que les hommes à incarner le pouvoir au moyen-âge. Si notre histoire de France est une succession un peu monotone d’Henri, de Louis et de François, c’est parce que les Anne, Jeanne et Marie en ont sciemment été évincées.
Comment ? Avec la première et la plus grosse fake news de l’histoire : la loi Salique.
Bien décidé à s'accaparer le pouvoir, les hommes de la clergie française (à ne pas confondre avec le clergé) ont décrété que l’exception française, ce petit je ne sais quoi qui nous différencie de nos voisins, c’est de ne pas avoir laissé de femmes arriver au pouvoir. Une tradition inventée de toute pièce en se basant sur une vieille loi de dotation de terre en échange du service militaire.
Mais qu’est-ce que l’on fait de ce constat, aussi douloureux soit-il ?
Dans ses ouvrages sur la France, les femmes et le pouvoir, Eliane Viennot nous fait découvrir les origines du backlash féministe. Pour évincer les reines de la tête de l'État, la haute administration est allée fouiller dans ses vieux grimoires pour trouver une obscure loi qui justifierait que le pouvoir ne soit confié qu’aux hommes. Cette mécanique de l’acaparation de nos droits s’observe encore aujourd’hui partout et dans toutes les sphères : remise en question du droit à l’avortement et même du droit de vote pour les masculinistes les plus virulents. D’où l’importance de connaître notre histoire, et les mécaniques de la misogynie (qui sont peu ou proue les mêmes : mythes fantaisistes et fake news) pour mieux les combattre.
Quand on parle d’égalité entre les hommes et les femmes, beaucoup s’arrêtent à ce que dit la loi. On entend souvent que les combats féministes ne sont plus nécessaires puisque les deux sexes sont désormais égaux dans la loi. Mais les lois ne sont pas les seules à façonner notre réalité.
Là où tout se joue, c’est dans la culture, les mythes sur lesquels reposent notre société. C’était vrai pour la loi salique dont on sait maintenant qu’il s’agissait d’une gigantesque arnaque. Pour la légitimer, ses contemporains ont donc dû créer de toutes pièces des figures féminines repoussantes, incompatibles avec toute forme de pouvoir : la reine belliqueuse, la régente incompétente et la savante sorcière.
Preuve que la culture est souvent plus forte que la loi, l’égalité légale entre les genres ne se traduit toujours pas par une égalité dans les faits. En entreprise par exemple, on ne peut pas se reposer uniquement sur les quotas. Ce sont les cultures organisationnelles qu’il faut changer, l’histoire que l’on raconte autour du pouvoir, les personnes et les valeurs que l’on érige en modèle.
Plus de 400 ans plus tard, il nous reste toujours du chemin à parcourir !
Depuis la dernière newsletters, 4 nouveaux épisodes sont en ligne !
Table Ronde - Parité et égalité : évolutions des lois et impacts culturels en entreprise. Un épisode un peu spécial puisqu’il s’agit de l’enregistrement de la seconde table ronde organisée avec Comète et Morning. Elle réunit trois femmes exceptionnelles avec trois visions différentes sur l'impact des lois sur les entreprises et l'évolution de la culture organisationnelle pour arriver à la parité.
Pour cette semaine du 8 mars, j'avais aussi envie de vous proposer une série différente, née de mes échanges avec Eliane Viennot, autrice de la série de livres : La France, les femmes et le pouvoir.
La loi salique : première loi fondamentale de France. Dans ce premier épisode, Eliane nous invite à déconstruire l’un des mythes fondateurs de la France : la loi salique. Présentée comme une tradition immuable, cette loi qui exclut les femmes du trône a en réalité été inventée de toutes pièces, façonnée par des jeux de pouvoir et largement diffusée via notre culture et ses mythes pour renforcer l’exclusion des femmes de la sphère décisionnelle.
Luttes féministes et émergence de la théorie de différenciation des genres. À travers la Renaissance, nous explorons avec Eliane les stratégies mises en place pour écarter les femmes du pouvoir, les résistances féministes de l’époque et le basculement progressif vers l’adhésion à une propagande qui limitera durablement leur influence. On s’intéressera en particulier à la façon dont la théorie de la différenciation des sexes a transformé la place des femmes dans la société et le travail et quelles formes a pris la résistance des femmes face à cette mise à l’écart ?
La révolution au masculin. Dans ce dernier épisode de la trilogie spéciale du 8 mars, Éliane Viennot nous explique comment, de la Révolution au Code Civil les femmes ont été progressivement écartées des sphères d’influence, et comment ces héritages pèsent encore aujourd’hui sur la place des femmes dans les rôles de décision. Un échange passionnant pour déconstruire les récits dominants et mieux comprendre les mécanismes d’influence.
Si vous préférez la lecture, tous les épisodes deviennent des articles
Quand j’ai lancé Le Pouvoir au Féminin, c’était pour donner la parole à celles qui façonnent le leadership autrement, pour montrer qu’il existe d’autres modèles, plus inclusifs, plus équilibrés. Mais très vite, je me suis demandé comment transformer ces réflexions en actions concrètes dans les entreprises ?
C’est pour ça que j’ai créé Egalead : une extension de Hand So Act, née du podcast et pensée pour accompagner les organisations qui ne veulent pas juste cocher une case, mais faire de l’égalité un véritable levier de transformation.
Parce que changer les règles du jeu, ce n’est pas qu’une obligation légale. C’est aussi une opportunité : des équipes plus engagées, des décisions plus justes, et un leadership qui reflète réellement la richesse des talents.
Egalead vous accompagne donc dans le développement d’une culture égalitaire et l’atteinte de la parité par l'acculturation de vos leaders aux enjeux de l'égalité et aux biais et stéréotypes de genre, mais aussi par la transformation de votre culture managériale.
Pour en savoir plus, cliquez ici !
On reste dans la thématique de l’effacement des femmes dans l’Histoire avec 3 recommandations qui vous permettront de leur redonner leur juste place.
Réécrire l’Histoire en féministe. Dans cet épisode du podcast Les Couilles sur la Table, Victoire Tuaillon reçoit 4 historiennes qui participent à visibiliser les femmes dans l’histoire. On y retrouve Eliane Viennot, mais aussi Christelle Taraud, autrice de « Féminicides. Une histoire mondiale », Fanny Gallot, qui s’est intéressée à la place des féministes dans les contestations populaires et Aïcha Limbada qui a écrit une histoire intimiste et politique de la nuit de noces.
The Woman King de Gina Prince-Bythewood. Sorti en 2022, ce film porté par la géniale Viola Davis, raconte l’histoire des Agojie, une unité de guerrières d’élite qui protégeait le royaume du Dahomey (actuel Bénin) au XIXe siècle. Inspiré de faits réels, il met en avant ces combattantes redoutables, longtemps éclipsées des récits historiques dominants.
Les femmes ou les silences de l'histoire de Michelle Perrot. Dans cet essai, Michelle Perrot revient sur le silence dans lequel les femmes ont été tenues dans la société depuis des siècles : silence des exploits guerriers ou techniques, silence des livres et des images, silence surtout dans le grand récit collectif qu’est l’Histoire de France. Une réflexion essentielle sur l’invisibilisation des femmes dans l’historiographie française et la manière dont elles ont été exclues des récits de pouvoir.
Bonus : Rencontre à la Cité Audacieuse le 25 mars prochain. Venez découvrir le livre “Guide de la déconstruction du sexisme au travail” de Marine Pétroline Soichot. Nous échangerons à partir de 19 h avec Laetitia Vitaud, Laury Maurice et l'autrice sur les stratégies pour en finir (enfin) avec les inégalités de genre au travail.
Pour retrouver toutes les informations sur le podcast et les activités autour, c’est ici: https://www.lepouvoiraufeminin-podcast.fr